Réconcilier théorie et pratique en éducation

Dans l’enseignement, la théorie et la pratique sont généralement traitées comme des catégories dissociées, voire opposées. Les rapports pédagogiques ne font finalement en cela que copier les rapports sociaux. De même que la division sociale du travail sépare les tâches d’exécution et de conception, créant entre elles une division hiérarchique, pareillement l’école tend à séparer les savoirs théoriques et les savoirs pratiques, la connaissance et le savoir-faire, l’enseignement général et l’enseignement professionnel, les futurs décideurs et les futurs exécutants.

Sans doute un tel mimétisme est-il en partie inévitable. L’école ne naît, ni ne vit, ni ne se développe toute seule. Il ne se pourrait qu’elle ne soit, peu ou prou, faite à l’image de son créateur et de son milieu : la société. Qu’on le veuille ou non, elle devra donc bien finir par trier, par sélectionner, par orienter les élèves et les étudiants vers des voies diversifiées et hiérarchisées. Et tout aussi inévitablement, l’une des dimensions de cette hiérarchie, sera l’axe théorie-pratique, avec la théorie trônant au sommet et la pratique reléguée dans le bas. C’est précisément pour cette raison que la question du rapport entre la théorie et la pratique à l’école est un enjeu majeur, non seulement pour l’enseignement lui-même, mais pour toute stratégie visant à changer l’ordre économique et social.

Le rapport entre la théorie et la pratique pose en effet tout d’abord cette question fondamentale : peut-on concevoir une société vraiment démocratique, c’est-à-dire sans division sociale du travail et du pouvoir ? Notre premier souci sera donc d’examiner dans quelle mesure la division théorie-pratique ne serait que le produit inévitable d’une division biologique entre ceux qui sont dotés d’une « intelligence théorique » et ceux qui possèdent surtout une « intelligence pratique ». Nous verrons pourquoi cette division est peu fondée et relève essentiellement d’un discours idéologique, c’est-à-dire un discours destiné à justifier la façon dont le monde fonctionne actuellement. C’est l’objet de la première partie de ce dossier : « Il y a les manuels et les intellectuels, non ? »

Ensuite, il sera bon de se souvenir que les savoirs scolaires sont d’abord… des savoirs. Or, même lorsqu’ils atteignent des niveaux élevés d’abstraction, leur production est toujours le résultat d’une pratique. Et c’est encore à l’aune de leur efficacité pratique que se mesure généralement leur validité. Il semble donc difficile de résoudre la question de la relation théorie-pratique à l’école — dans les programmes, dans la didactique, dans l’organisation scolaire — sans comprendre d’abord cette même relation au niveau des processus de production des savoirs qu’on y enseigne. La deuxième partie est intitulée : « Pas de théorie sans pratique. Et inversement »

Nous nous pencherons enfin sur ce que certains grands courants pédagogiques nous disent de cette relation théorie-pratique : des partisans de la Arbeitsschule allemande du début du XXème siècle jusqu’aux défenseurs modernes de l’approche par compétences, en passant par les différents courants de l’Ecole nouvelle , de l’école polytechnique et du constructivisme. Nous nous attacherons plus longuement aux thèses originales et trop peu connues du grand psycho-pédagogue Lev Vygotski et tenterons, dans la foulée, de formuler quelques propositions pour une « didactique de la construction des savoirs » alliant théorie et pratique. C’est notre troisième partie : « Transmettre les savoirs en les construisant »

Contenu du dossier :

- « Il y a les manuels et les intellectuels, non ? »
- « Pas de théorie sans pratique. Et inversement »
- « Transmettre les savoirs en les construisant »

Plús  APED

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